Prier avec une œuvre d’art #3

 ECOUTEZ ET VOUS VIVREZ

La Samaritaine

 

Lucas Cranach l’Ancien, 1472-1553, Le Christ et la samaritaine, 1525/37, musée de Leipzig

Lucas Cranach l’Ancien, peintre et graveur de la Renaissance allemande, ami de Luther, offre, dans ce retable, cette vision de la rencontre entre Jésus et la femme samaritaine au puits de Jacob, racontée dans l’évangile de Jean au chapitre 4.

Jésus arrive donc à une ville de Samarie, appelée Sykar,

 La construction est admirable : au centre et en avant, les protagonistes de la scène, Jésus, la samaritaine et le puits, et deux représentations en arrière-plan, les disciples et la ville de Sykar au pied du mont Garizim.

Je regarde l’ensemble de ce tableau, je définis ce qu’il m’évoque, en quoi m’émeut-il ?

Je suis les regards de chacun. J’écoute les paroles de Jésus, de la samaritaine, les murmures des disciples dans la trouée lumineuse, le brouhaha de la ville, les chants qui émanent du temple.

 Dans ma vie, comment est-ce que j’écoute ce qui se passe autour de moi ? j’entends ou j’écoute ? Quand j’y ai prêté attention, qu’est-ce que cela a changé en moi, qu’est-ce que cela a changé dans mes rapports avec mon proche, avec ceux que je côtoie parfois même sans les regarder ?

 

« Comment ! Toi, un Juif, tu me demandes à boire, à moi, une Samaritaine ? » – En effet, les Juifs ne fréquentent pas les Samaritains.

Qu’elle est élégante cette femme dans sa robe rouge, son collier raffiné et sa chevelure enserrée dans un délicat filet ! Elle veut plaire aux hommes ! Elle a retroussé sa jupe pour pouvoir puiser l’eau à la source du puits. Elle tient fermement le seau qu’elle a plongé dans le puits et remplira la cruche qu’elle a posée par terre. Elle remplit ses tâches matérielles mais son attention est ailleurs, elle regarde intensément Jésus et écoute les paroles de cet homme qu’elle ne connaît pas, cet étranger qui ose lui parler, l’écouter, échanger avec elle.

Elle écoute et comprend que l’homme peut lui donner une eau particulière, l’eau de la Parole de Dieu, il parle d’une soif autre, une soif qui la travaille.

Je me rappelle avoir posé des questions qui me tiennent à cœur, comment cela s’est-il passé ? est-ce que cela m’a donné envie d’approfondir ?

 Je me rappelle avoir écouté les questions d’une personne qui est venue me rencontrer. Quel accueil lui ai-je réservé ?

 

Jésus lui répondit : « Si tu savais le don de Dieu et qui est celui qui te dit : “Donne-moi à boire”, c’est toi qui lui aurais demandé, et il t’aurait donné de l’eau vive. »

Je regarde, moi aussi, Jésus assis sur la margelle du puits, fatigué de son voyage, fatigué de nos fatigues. Il regarde intensément la samaritaine, enveloppé dans un simple vêtement bleu de voyageur, les pieds nus, s’opposant à l’élégance de la femme. Ses mains sont agitées, il argumente, enseigne, bénit la femme à qui il veut tellement de bien… sans rien lui demander en retour. Il rejoint la soif de la femme, sa soif d’être vraiment aimée.

Jésus veut lui donner de l’eau vive, l’eau de la Vie de Dieu.

Ils s’écoutent mutuellement, et avancent ensemble au cours de leur conversation, atteignant un niveau spirituel.

Comment est-ce que j’écoute la Parole de Dieu ? Quelle est mon attention ? Je me rappelle d’un moment où j’ai été spécialement réceptif. Quelles conséquences pour ma vie quotidienne ?

 Quels sont les moyens que je prends pour comprendre ce que Dieu veut pour rendre intelligible sa Parole pour moi?

 « Si tu connaissais le don de Dieu. » je réalise combien le don de Dieu est incroyable, je nomme des exemples de ces dons de Dieu.

 

Jésus lui répondit : « Quiconque boit de cette eau aura de nouveau soif ; mais celui qui boira de l’eau que moi je lui donnerai n’aura plus jamais soif ; et l’eau que je lui donnerai deviendra en lui une source d’eau jaillissant pour la vie éternelle. »

Au centre un puits… c’est le puits qui fournit l’eau nécessaire à la vie. Le puits est aussi un lieu de rencontres, d’échanges, de partage. On se rappelle l’importance des puits dans la vie de Moïse :

C’est aussi un point de départ vers un changement de vie, vers une vie nouvelle, plus « riche », plus « belle », plus proche de Dieu.

La samaritaine y plonge un seau qu’on ne voit pas, eau mystérieuse ? Eau qui donne la vie éternelle.

 Que représente pour moi cette eau que Jésus propose ?

 Je me souviens de mon baptême, de ma plongée dans la mort pour atteindre la résurrection. Qu’ est-ce que cela représente pour moi ?

 Je nomme ce qu’est pour moi cette soif que j’ai. Quels moyens je prends pour être prêt à reconnaître ce don, à l’accueillir, à le partager ?

 

La femme lui dit : « Seigneur, je vois que tu es un prophète !… Eh bien ! Nos pères ont adoré sur la montagne qui est là, et vous, les Juifs, vous dites que le lieu où il faut adorer est à Jérusalem. »  Jésus lui dit : « Femme, crois-moi : l’heure vient où vous n’irez plus ni sur cette montagne ni à Jérusalem pour adorer le Père.

Cranach présente derrière la samaritaine la ville de Sykar et le mont Garizim dans un bleu lointain à l’horizon. Vers 330 av JC les samaritains avaient bâti au sommet un temple devenu leur centre religieux, comme le temple de Jérusalem pour les Juifs. La ville est fortifiée, ressemblant à une ville de l’époque du peintre, avec son église, ses fortifications. Le dessin est précis, les reflets dans l’eau de la rivière font un tableau dans le tableau !

Jésus relativise le temple au profit de sa Parole, les frontières éclatent, la Parole a une portée universelle. La prière, la relation à Dieu, ne dépend pas d’un temple, mais d’une relation en esprit et en vérité.

Je prie en Esprit et en vérité. Je commence par faire appel à l’Esprit. Ma prière à Dieu est habitée par l’Esprit.

 Où est le lieu de ma prière ? Où est-ce que j’écoute le mieux la Parole de Dieu ? Quels sont les lieux qui facilitent ma prière intérieure, ma relation personnelle avec Dieu ?

  

Mais l’heure vient – et c’est maintenant – où les vrais adorateurs adoreront le Père en esprit et vérité : tels sont les adorateurs que recherche le Père.

 Avec la samaritaine je découvre que « l’heure vient et elle est déjà venue », c’est maintenant, pour moi, celle de ma relation en direct avec Dieu. Dieu me cherche, comment est-ce que je me laisse trouver ?

 

 À ce moment-là, ses disciples arrivèrent ; ils étaient surpris de le voir parler avec une femme. Pourtant, aucun ne lui dit : « Que cherches-tu ? » ou bien : « Pourquoi parles-tu avec elle ? »

Je regarde cette étonnante manière de présenter les disciples, groupe soudé, sur un fond sombre d’arbres mais marchant sur un terrain de lumière. Leurs visages sont bien réels, sans doute des portraits. Ils regardent dans tous les sens, leurs vêtements sont de couleurs variées, franches, enthousiastes. Comme Jésus ils sont nu pieds. Leurs expressions sont diverses. L’un d’eux semble nous interpeller ! Avec lequel puis-je m’identifier ? Quel est mon sentiment en voyant Jésus discuter avec la Samaritaine, sourire ? Étonnement ? Désapprobation ? Scandale même ?   Mais tous restent en retrait, ne s’avançant pas craignant de partager avec cette hérétique.

Quelle est mon attitude quand je rejoins un groupe qui partage de manière différente de la mienne ? j’interviens, j’écoute, je tente d’imposer mon point de vue ?

 Je me souviens d’une conversation pendant laquelle j’étais gêné pour afficher ma foi, suis-je resté sur mon quant-à-moi ? Ai-je cherché à montrer l’amour de Dieu pour chacun différent ? Que sa Vie était pour tous.

Comment est-ce que j’écoute une personne différente de moi, étrangère, d’une autre religion ?

 

« Venez voir un homme qui m’a dit tout ce que j’ai fait. Ne serait-il pas le Christ ? »

L’écoute a permis à la Samaritaine de reconnaître Jésus, d’illuminer sa vie, de le nommer, de partir l’annoncer.

 

 

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