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5 septembre 2010 - 23 ème dimanche ordinaire- Année C

De grandes foules



Les références des textes de ce dimanche
Sagesse 9,13-18
Psaume 89
Philémon
9-10.12-17
Luc 14,25-33

 

Le commentaire des lectures bibliques
par Marcel Domergue, jésuite, rédacteur à Croire aujourd'hui

Que cherchent tous ces gens qui suivent le Christ sur la route de Jérusalem ? Beaucoup imaginent que cet homme, capable de guérisons et autres prodiges, va prendre le pouvoir ; l'épisode des Rameaux va bien dans ce sens. De même, sur la route d'Emmaüs, la réflexion des deux disciples rejoints par Jésus : « Nous espérions que c'était lui qui délivrerait Israël… » Dans notre évangile, Jésus se retourne vers ceux qui le suivent et les détrompe. Il leur révèle que l'on ne va pas vers « le rétablissement du Royaume en faveur d'Israël » (Actes 1,6), mais vers la perte de tout ce qui fait notre vie en ce monde, en vue d'un dépassement encore inimaginable.
Un Royaume, d'accord ; mais qui n'est pas de ce monde. Nous pouvons nous demander ce qu'espèrent les foules de chrétiens qui constituent l'Église, dont les responsables n'ont d'ailleurs pas toujours renoncé à exercer un « pouvoir temporel ». Ce qui explique sans doute que les « grandes foules » d'aujourd'hui, détrompées par l'évolution de l'histoire et constatant que Dieu nous en laisse totalement la gestion, renoncent à suivre le Christ. Et pourtant, il trace une route, la seule, que reproduisent nos histoires individuelles et notre histoire collective. Il s'agit de notre traversée vers la Vie invulnérable de Dieu. En chemin, nous devons abandonner, un à un, tous nos bagages. Ce qui nous semblait le plus nécessaire nous est retiré. Jésus sait qu'il va vers ce dépouillement sans réserve qui fera place nette pour la vie nouvelle. Le suivre nous fait peur ? Normal : Jésus lui-même, à Gethsémani, a connu cet effroi et a dû le surmonter.

 

Le chemin de croix
L a traduction liturgique nous dit que nous devons « préférer » Jésus à tout, y compris aux êtres les plus proches. Le texte grec dit
« haïr », ce qui s'explique par le fait que les langues sémitiques, sous-jacentes, ne connaissent pas le comparatif. « Préférer » en est un et convient mieux au sens des paroles du Christ. En effet, en Marc 7,9-13, nous l'entendons mettre l'amour pour un père et une mère en difficulté plus haut que le caractère sacré d'une offrande avec laquelle nous pourrions leur venir en aide. En Marc 10,3-12 et Matthieu 19,3-12, il souligne le caractère absolu de l'union de l'homme et de la femme, au-delà des traditions et des habitudes, au-dessus de la Loi elle-même. Mais alors, que signifie cette « préférence » dont parle notre texte ? N'oublions pas que Jésus est en marche vers Jérusalem où il devra tout perdre, y compris sa propre vie. Que nous le sachions ou non, que nous l'acceptions ou non, nous en sommes tous là. Les personnes d'un certain âge me comprendront : au fil du temps, nous perdons une à une les réalités qui fondaient notre vie : nos forces, notre santé, la perfection de nos facultés, notre conjoint, nos enfants qui vont ailleurs vivre leur vie. C'est totalement dénudés que nous parvenons au terme qui nous prive de notre « propre vie ». Alors, voici la question : allons-nous mettre toute notre confiance dans le Christ, au-delà de la relation quelque peu idolâtrique que nous entretenons avec ce qui peuple notre existence ? Toute métaphore dépassée, nous avons à le suivre à Jérusalem en son passage par la Croix, pour nous retrouver avec lui en sa résurrection. Ne fermons pas les yeux, c'est là de toute façon que nous allons. Essayons de le suivre dans cette joie qui ne peut venir que de la foi.

 

Que désirons-nous vraiment ?
Notre évangile continue par l'exemple de l'homme qui veut bâtir une tour ou partir en guerre. Il s'agit de la qualité de notre désir. Plus exactement, de la qualité de ce que nous désirons spontanément. Construire une nouvelle tour de Babel ? Nous mesurer à plus fort que nous ? C'est notre volonté de puissance qui est ici mise en question. Nous retrouvons la logique des lignes précédentes : que désirons-nous au juste ? Choisir de suivre le Christ sur sa route n'est pas facile. Comprenons déjà qu'il n'a pas choisi de lui-même d'en passer par là. La souffrance ne vient pas de Dieu ; il ne la veut pas. Ce qu'il veut, c'est nous rejoindre dans tout ce que la vie nous donne à supporter. Ce sont les hommes qui dressent les croix. Dieu vient habiter le pire que nous avons à subir, pour nous en faire sortir. L'oeuvre de Dieu, c'est la résurrection de cette vie qu'il nous a donnée et que nous avons perdue. C'est vers la vie que nous allons. Voilà ce que nous avons à choisir, même si en chemin nous devons perdre tout le reste. Notre problème, c'est que nous voulons tout. Suivre le Christ dans ces conditions, être son disciple, est impossible, comme le souligne la dernière phrase de notre évangile. Et pourtant, si nous avons beaucoup de mal à rejoindre le Christ dans sa traversée du malheur des hommes, si nous n'osons même pas l'envisager, ne désespérons pas. Revenons aux disciples d'Emmaüs : voici des hommes qui désertent Jérusalem, où tout se passe. Nous sommes souvent semblables à ces hommes-là, pleins d'illusions au sujet de ce que le Christ est venu accomplir. Or, il les rejoint sur leur mauvaise route et leur rend la joie de la vérité.

Père Marcel Domergue, jésuite