Retour page d'accueil

psaumerécit évangéliqueoeuvre d'artsite internet écrit spirituel    intentions de prièreprière continuechercher et trouver Dieucélébrer le dimancheprier avec l'actualité    retraite - infosretraite - programmeretraite - calendrierretraite - inscription
Notre Dame du Web - Centre spirituel ignatien sur internet

livre d'orspiritualité ignatiennepriersites à voirà lire sans fautenous écrire

 

 

  
16 mars 2008 - dimanche des Rameaux - Année A

 

                                    Le commentaire des lectures bibliques
                      par Marcel Domergue, jésuite, rédacteur à Croire aujourd'hui

La Croix, un scandale

Pourquoi ce réflexe de recul en moi, au moment d’aborder la rédaction de ce commentaire de la Passion du Christ ?
Sans doute parce qu’il faut dépasser le folklore pour regarder en face le spectacle de l’horreur. La Croix ? Nous en avons fait des bijoux, des oeuvres d’art. Est-ce pour apprivoiser et conjurer l’intolérable ? Et l’on nous dit que c’est là que se révèle l’ultime vérité sur Dieu et sur l’homme ! Comment ne pas avoir envie de tourner la page et de nous livrer à quelque activité divertissante ?
Nous voici loin de l’enthousiasme de la foule lors de l’accueil de Jésus à Jérusalem ! Une foule inconsciente, qui acclame un homme qui, pense-t-elle, va prendre le pouvoir et restaurer la royauté davidique. Ces gens sont-ils les mêmes qui, déçus, crieront dans quelques semaines « Crucifie-le » ? Ou alors assistons-nous à la réédition des rituels archaïques qui prescrivaient de choyer la victime avant son exécution ?

Et pourtant ils ont raison : l’entrée de Jésus dans la ville qui tue les prophètes (Matthieu 23,37) inaugure sa glorification. Une glorification dont ils ignorent les chemins et qui ne cesse de nous déconcerter. Pourquoi le Christ doit-il passer par là ? S’il devait mourir un jour, pourquoi pas d’une mort paisible ? Pourquoi l’horreur d’une souffrance inutile ? Oui, la Croix est bien d’abord un scandale, c’est-à-dire une pierre d’achoppement qui peut nous faire trébucher.


Des croix dressées tous les jours

Mais savons-nous ce qui nous déconcerte à ce point quand nous regardons le Christ crucifié ? C’est d’abord le spectacle de ce que nous appelons le péché. Le péché de l’homme, négation de l’amour, est toujours une variante du meurtre. Toute conduite qui va dans le sens de la diminution ou de l’ignorance d’un autre homme, tout refus du pardon sont élimination du Christ et de ce qu’il apporte. Nier et renier le Christ passe par notre refus d’autrui. Cela peut prendre des formes en apparence anodines. Par exemple quand nous nous esquivons pour ne pas être ennuyés par les problèmes de l’autre, quand nous nous fermons à ses façons de voir ou de vivre. Dérision, mépris, négligence… Innombrables sont les manières de chasser le Christ de nos vies ! Tout cela, et d’autres comportements bien pires, demeurent cachés, plus ou moins volontairement oubliés.
Nous sommes des virtuoses dans l’art de mettre le Christ et sa parole entre parenthèses. Voici maintenant que toutes nos dérobades (pensez aux disciples au cours de la Passion) et toutes nos malveillances apparaissent en plein jour, érigées sur le calvaire.
« Il a été transpercé par nos infidélités, broyé par nos fautes… »
(Isaïe 53,5).

Dieu avec nous, jusqu’au bout

Donc, nous ne pouvons pas dire : « Ils ont crucifié le Christ », mais bien : « J’ai crucifié le Christ ». Car c’est bien nous qui l’avons éliminé, pas Dieu. C’est là que nous rencontrons une autre cause de notre malaise devant la Croix. On nous répète que Dieu est Amour et, en même temps, que c’est lui qui a voulu la crucifixion. Nous sommes habités, du moins les plus âgés d’entre nous, par le cliché de la satisfaction de la justice divine. Résumons : les hommes ont offensé Dieu. Ce Dieu, vu comme un suzerain omnipotent, exige que l’offense soit réparée.
Or l’homme, s’il est assez grand pour produire des méfaits qui blessent Dieu, est trop petit pour les réparer. Le Fils va s’en charger. Ce Dieu nous demande de pardonner mais, lui, il ne pardonne pas ! Il faut que quelqu’un paye la dette pour que justice soit faite. Il faut que ça saigne ! Dieu est ainsi présenté comme responsable de la crucifixion. Certes, on pourrait produire certains textes scripturaires qui ont l’air d’aller dans ce sens, y compris le « que ta volonté soit faite et non la mienne ».

Heureusement, d’autres textes innocentent Dieu, en particulier Actes 4,10 : « Ce
Jésus que vous avez crucifié, Dieu l’a ressuscité » (voir aussi Actes 2,36 et 5,30). Conclusion : c’est nous qui dressons les croix, au Proche-Orient, en Afrique, partout dans le monde. Ces croix, le Christ les assume toutes. L’amour unit pour le meilleur et pour le pire. Dieu a voulu venir avec nous jusque dans le pire ; mais c’est pour nous conduire de là jusqu’au meilleur. Partout où l’homme peut aller, Dieu vient le rejoindre ; il descend jusque dans nos enfers, pour nous en arracher. Le voici au rang des malfaiteurs et de leurs victimes. Jamais, nulle part, nous ne sommes seuls. Telle est la volonté de Dieu, du Père.

 

"Copyright AELF - Paris - Tous droits réservés"